Un patois
Le patois de Sologne bourbonnaise, comme bon nombre de parlers locaux, est en voie de disparition. Seuls quelques mots ou expressions subsistent encore.
En 2008, des membres de l’association se sont réunis en séances de travail au sein de la Société d’Emulation du Bourbonnais, à Moulins, afin d’étudier le patois de la Sologne bourbonnaise. Les mots utilisés par cette langue orale disparaissant peu à peu, au fur et à mesure du renouvellement des générations et du brassage des populations, il paraissait urgent de les pérenniser en les collectant dans le but d’éditer un « dictionnaire ».
Pour ce faire, les « chercheurs » ont eu recours aux anciens ayant toujours vécu dans cette région du Bourbonnais. La principale difficulté résidait, logiquement, dans l’écriture des mots…
Cet atelier « patois de la Sologne bourbonnaise » a fait l’objet d’un reportage sur TF1, dans le cadre d’une enquête sur les langues régionales, diffusé le 6 janvier 2009 dans le journal de 13 heures.
Ce travail de longue haleine terminé. L’ouvrage ainsi réalisé et publié en 2012 s’intitule : « Mémoires du patois de Sologne bourbonnaise. Langage et société ».
Afin de promouvoir cet ouvrage référence, CSB a organisé, en février 2012, une « soirée patois », réunissant une grande partie des auteurs, sous la présidence de Sylvie Villate, alors présidente de la Société d’Emulation du Bourbonnais.
Les associations ayant participé à l’élaboration de cette « encyclopédie » du patois de Sologne bourbonnaise étaient toutes représentées : Amis du Musée rural de Sologne Bourbonnaise, La Jimbr’tée, Neuilly Hier et Demain, Société d’Emulation et CSB.
Origine du projet, méthodes de travail et anecdotes ont émaillé cette soirée qui s’est terminée par quelques « ch’tites histoires en patois » énoncées par le secrétaire de CSB, Robert Thaveau.
Une ch’tite histouère en patois
« J’va vous raconter une histouère qu’sest passée à La Chapelle aux Chasses en Sologne Bourbonnaise v’là ben au moins 150 ans. Y’avait au bout du bourg un houme nommé Arsène. Al habitait une ch’tite maison vè l’église, toute neuve à c’tépoque vù qu’l’aute s’était abrasée à la Révolution.C’était l’bijiji du village mais al’avait une aut’activité ben pù prenante : y « pansait » l’monde. Ca en v’nait d’partout. Paraît que rien en m’rgounnant des marmoins, y rendait les b’rdins pù intelligents et y a des fois qu’y’avait gros à faire !Un jour, le Tienne de « Montapeine » va l’voir en l’y disant qu’al était aquené depuis la bonne Dame : lui qu’était le roi du gouyard, y pouvait même pù le l’ver pour raper la trace, pas pù qu’magner les gerbes pour faire les teurziaux.L’Arsène y’a dit qu’fallait prendre, à l’heure où qu’les côs s’abergent, une décoction à base de goutte de b’rlosses et d’venin d’verpi, pis ensuite aller à la source Sainte Anne les trois gnuits d’été d’pleine lune et y boire trois verres d’eau.Au « Bois Piou », l’Eugènie qu’on appelait la « Génie » s’lamentait. Depuis quéqu’temps, v’là qu’elle s’est r’trouvée la figure en feu, pleine de quetouffes, toute g’rnolée. La pauv’gate r’semblait à un épouvantail à oyasse. Al va voir l’Arsène. Il y a prescrit un masque d’beauté (comme on dit mainten’ant). Fallait faire macérer dans d’leau bénite des feuilles d’aubier, des lappes, de l’ourtie cueillie à la rosée et des feuilles de verziaux. Ensuite, al devait s’rendre à la fontaine Sainte Anne les trois gnuits d’été d’pleine lune en passant par le « Moulin Bouquet » pour s’tremper les pieds dans l’Acolin. A la sainte Anne, fallait qu’elle se trempe le feugnon dans l’eau par trois fois.Les résultats ont été au d’là des espérances.La quetouffe du visage d’la Génie s’est déplacée pù bas, le Tienne était r’zippé du ghiabe et l’curé les a vit’ment mariés pacqu’un bouinat s’est annoncé .Y z’avaient, comme on dit, fêter Pâques avant les rameaux « ..Les limites géographiques du territoire Sologne bourbonnaise sont depuis lors très discutées, à tel point qu’il est bien difficile d’en délimiter les contours de manière précise…
Petit lexique à l’intention des « étrangers » : Abrasée : écroulé ; bijiji : rémouleur ; pansait : soignait ; m’rgounnant des marmoins : marmonnant des prières ou incantations ; B’rdin : idiot, simple d’esprit, niais ; aquené : très fatigué, las ; Gouyard : serpe à manche ; râper la trace : tailler la haie ; Les côs s’abergent : les dindons se perchent ; B’rlosse : prunelle sauvages ; Verpi : vipère ; quetouffes : cloques ; G’rnolée : vérolée; Gate : fille ; Oyasse : pie ; Lappes : bardane ; Verziaux : osier ; feugnon : nez ; R’zippé :allé mieux ; ghiabe : diable ; bouinat : bébé.
Une BD en patois
Afin de soutenir l’association Les Amis du patrimoine rural de Sologne Bourbonnaise, qui a œuvré pendant de nombreuses années à la gestion, à l’entretien et à la mise en valeur des collections de l’ancien musée de Beaulon, Chevagnes en Sologne Bourbonnaise a publié, début d’année 2019, une BD en patois intitulée « La guérison miraculeuse », d’après une nouvelle de Robert Thaveau (secrétaire de CSB), scénarisée et mise en dessins par Alain Muller (ancien président des Amis du musée rural de Beaulon).
L’histoire cocasse de trois personnages truculents : « la Berthe », « l’Glaudius » et son copain de régiment » l’Léon » ! Un périple à travers la campagne bourbonnaise, de Paray-le-Frésil, en Sologne Bourbonnaise, à … Saint-Menoux, en Bocage Bourbonnais.
A l’intérieur, un petit livret d’activités destiné aux enfants qui peuvent ainsi découvrir et jouer avec les mots en patois.
Un matin, la Berthe se réveille mal en point, elle a fait un rêve étrange et pense devenir « b’rdine » ! Le Glaudius accueille son copain Léon, marinier de passage sur le canal, et lui confie les mésaventures de sa Berthe qu’il décide d’emmener au déb’rdinoire à Saint-Menoux…