Des personnages illustres
Qui était René Barjavel ?
René-Gustave-Henri Barjavel est né le 24 janvier 1911, rue Gambetta, à Nyons, dans la Drôme.
Fils d’Henri Barjavel, boulanger, et de Marie Paget ; petit-fils de paysans issus d’une lignée de notaires.
Après l’école primaire, qu’il considérait comme le bagne, il fait ses études au collège de Nyons où il rencontre Abel Boisselier, proviseur qui, lors de sa mutation à Cusset, lui propose de le suivre. C’est donc grâce à Boisselier que Barjavel arrive en Bourbonnais.
C’est au collège qu’il découvre la littérature : « j’étais un grand lecteur et la vocation d’écrire s’est emparée de moi. Je ne savais pas quoi, ni comment, mais j’avais ce désir ».
Après le bac, il fait de nombreux métiers pour gagner sa vie : pion au collège de Cusset, employé de banque, agent immobilier à Vichy; il donne même quelques cours d’anglais.
A 18 ans, la chance lui sourit, il débute dans le journalisme au Progrès de l’Allier, à Moulins. Il y acquiert une expérience mais surtout une passion pour un métier qui restera le sien toute sa vie, mais aussi pour le monde de l’écrit dans toute sa diversité et toutes ses techniques.
En 1935, il devient secrétaire de rédaction de la revue mensuelle Le Document (en quelque sorte le Paris match de l’époque), puis chef de fabrication des éditions Denoël. C’est fin septembre 1935 que Barjavel quitte le Bourbonnais. Il collabore alors à divers journaux, en particulier au Merle Blanc (hebdomadaire), comme critique cinématographique.
Après la Seconde Guerre Mondiale, installé à Paris, il commence à publier une série de romans d’anticipation qui feront de lui le précurseur de la « science-fiction ».
Il s’intéresse de plus en plus au monde du cinéma. En 1949, il participe pour la première fois à l’écriture d’un scénario : « Femme sans nom » et à partir de 1951 son activité dans le domaine cinématographique prend un tournant décisif. Il est tour à tour adaptateur, dialoguiste de cinéma, il s’essaie même à quelques courts-métrages. Ainsi retrouve-t-on son nom aux génériques de réalisations fort célèbres : Les Misérables, Le Guépard, les Don Camillo, etc.
Il a même écrit des paroles de chansons et quelques sketches.
Après ce long intermède dans le monde du cinéma, il renoue avec la littérature en publiant « La nuit des temps » et « Le Grand Secret ». Mais il retourne également vers le journalisme en tenant notamment des chroniques dans Le Journal du Dimanche, à la télévision et à la radio.
Consécration : en 1980 est diffusé sur la deuxième chaîne de la télévision française le téléfilm en deux épisodes Tarendol, adaptation de l’inoubliable roman éponyme, dont les droits avaient été achetés dès 1946. Barjavel a participé activement à la réalisation de ce téléfilm aux côtés de Louis Grospierre.
René Barjavel est décédé le 24 novembre 1985, à l’hôpital Cochin, des suites d’une crise cardiaque. Il repose au petit cimetière de Tarendol, face au Mont Ventoux.
Tous ces éléments sont tirés de diverses biographies consacrées à l’auteur et trouvées également sur le site : http://barjaweb.free.fr
René Barjavel à Chevagnes
En consultant les registres d’inscription des écoles, on découvre que sa fille Renée, née le 10 mai 1937, fut inscrite du 11 avril au 6 octobre 1944 à l’école de Chevagnes et domiciliée à l’Hôtel du Cheval Blanc. C’est précisément là, dans la cour de l’hôtel, que certains Chevagnois se souviennent de Barjavel assis près du puits situé dans l’arrière cour, rédigeant des feuillets qu’il donnait ensuite à saisir à quelques dactylographes du pays, notamment une des filles Litaudon.
Contactée à l’heure où nous écrivions ces lignes, Renée Barjavel n’a que très peu de souvenirs de son séjour à Chevagnes, tout juste se souvient-elle de sa chambre à l’Hôtel du Cheval Blanc.
Barjavel a vraisemblablement effectué plusieurs séjours en pays chevagnois, malheureusement ceux-ci ne sont relatés dans aucune biographie. Seuls quelques contemporains qui ont côtoyé l’auteur et l’ont vu à Chevagnes ont pu en témoigner, à l’image de Georges Guitton, 92 ans, qui avait accepté de nous recevoir pour évoquer ses souvenirs de René Barjavel.
Le témoignage de M. Guitton : Georges Guitton, aujourd’hui décédé, a habité Chevagnes à partir de 1935; ébéniste de métier, il tenait également, avec son épouse, un magasin qui faisait à la fois office de droguerie, bazar, articles funéraires, etc.
Il se souvenait très bien de René Barjavel qu’il a rencontré au Cheval Blanc, chez Sourdille, lorsqu’il y faisait des travaux de menuiserie ou ébénisterie : « René Barjavel était un homme solitaire et mystérieux. J’ai été fait prisonnier le 20 juin 1940 et ne suis revenu de captivité que le 20 mars 1942, ça devait donc être en 1943 ou 1944. Barjavel se plaisait dans le jardin de l’hôtel où il s’installait près du bassin pour écrire.
Mais il ne parlait jamais de ce qu’il faisait. Il arrivait à Chevagnes en car, je ne l’ai jamais vu en automobile. Il faisait souvent des promenades à pied jusqu’aux « Ménards » ou au pont des « Ternes » et il ne passait jamais devant notre magasin sans y entrer pour saluer mon épouse. Il aimait se promener dans la campagne environnante car il aimait les vieilles bâtisses et savait apprécier la richesse du patrimoine de Chevagnes ».
Le témoignage de Christophe et Lucienne Lébeaupin : rencontre avec Christophe et Lucienne Lébeaupin qui se sont retirés à Decize après avoir vécu, jusqu’en 1961, à Chevagnes.
Christophe Lébeaupin est né à La Chapelle-aux-Chasses le 17 juin 1922. A partir de 1938, il travaille avec ses parents sur le domaine de « Montchenin », propriété de M. D’Allaines, en qualité de basse-courrier.
C’est d’ailleurs grâce à M. D’Allaines qu’il rencontre celle qui deviendra son épouse Lucienne Masson, née en 1926 à Paray-le-Frésil. Christophe et Lucienne se sont mariés en 1947. Le couple se souvient parfaitement avoir reçu plusieurs fois la visite de René Barjavel à Montchenin, entre 1943 et 1944.
Ensemble, ils évoquent, comme Georges Guitton, un homme simple, solitaire et taciturne, qui aimait se promener dans la campagne solognote. « On sentait bien qu’il aimait la terre, la nature, les choses simples ». Lucienne se souvient particulièrement de Barjavel dégustant avec délectation le fromage blanc préparé par la grand-mère Lébeaupin. Il trouvait à Montchenin une « ambiance » familiale qui manifestement lui faisait défaut.
Il adorait notamment la petite Camille (née en 1939), sœur de Christophe Lébeaupin, qui avait à ce moment-là 4-5 ans et avec qui il passait beaucoup de temps. « Il était fou de cette gamine ! Avec Camille, il était différent : beaucoup plus expansif, plus chaleureux ! », se souvient Lucienne. C’était pendant la guerre, il était séparé de sa femme et de ses enfants qu’il voyait peu et, bien qu’il n’ait _ évidemment _ jamais fait la moindre confidence à ce propos, sans doute Camille comblait-elle ce vide affectif !
« On avait remarqué qu’il n’aimait pas parler. Tout juste échangeait-il quelques banalités, pour la forme, avec nous ! Par contre, quand il allait manger son fromage, il conversait plus facilement avec la grand-mère », mais sans pour autant se mettre à nu : quid de sa vie privée et de ses activités ! Des rares conversations échangées avec l’auteur, la famille Lébeaupin conserve toutefois le souvenir de sa farouche et incessante opposition à la guerre.
Christophe et Lucienne ignoraient qu’il était marié à Madeleine de Wattripont et qu’il avait deux enfants. Seule Denise (née en 1928), une autre sœur de Christophe, se souvient l’avoir vu un été, pendant les grandes vacances, se promenant en compagnie de deux enfants en bas âge, un garçon et une fille. Elle comprit dès lors qu’il s’agissait de ses enfants. C’était vraisemblablement durant l’été 1944 puisque Renée, l’aînée des enfants Barjavel, âgée de 7 ans, était inscrite sur les registres scolaires d’avril à octobre 1944. Tous confirment, comme Georges Guitton, qu’ils logeaient au « Cheval Blanc ».
Quand Barjavel évoque le Bourbonnais dans ses écrits
« Journal d’un homme simple » : Dans « le journal d’un homme simple », le 25 août 1949, Barjavel écrivait sous le titre « Les guerres du temps jadis » : « Il y a cinq ans, Paris était libéré. J’ai vécu ces jours-là du haut de mon balcon, qui domine tout Paris. J’ai vu les fumées monter dans son ciel. J’étais seul. J’avais mis ma femme et mes enfants « à l’abri », à la campagne. Ils ont failli être mangés tout crus par les Mongols d’Hitler qui se repliaient justement en passant par là. Moi, j’étais bien tranquille pendant ce temps, et j’écrivais mon journal.
A cinq ans d’intervalle, il a pris une certaine saveur. Voulez-vous le lire ? Je vous donne ma parole qu’il a bien été écrit en août 1944 et que je n’y ai pas ajouté un mot. Au contraire. J’ai coupé. Tout ce qui me regardait moi seulement, et pas vous. Excusez-moi… ».
« Demain le paradis » : (page 927, édition Omnibus) « Si j’étais Dieu, je viendrais en France au printemps. Je choisirais le Bourbonnais à cause de la douceur de ses collines où l’on a envie de promener sa main comme sur une femme.
« Les années de l’homme » : (page 782, édition Omnibus) « Je viens de passer une semaine en Bourbonnais où, par bonheur, on a peu coupé les arbres (…). Les paysages du Bourbonnais sont tout en courbes, douces et riches, seins et hanches coupés qu’on voudrait caresser de la main comme on les caresse de l’œil ».
Les travaux de recherche permettant d’attester la présence de Barjavel à Chevagnes ainsi que les citations ci-avant sont le fruit d’un travail collectif de l’ensemble des membres du bureau de l’association CSB. Quant aux témoignages, ils ont été recueillis voilà plusieurs années par la présidente de l’association.